jeudi 19 mai 2011

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" Il pleut du vent sur cette maison d’herbes folles. Le jour est proche de la mort, le calme vient en récompense, répandre le feu et demander pardon. Un cortège de noces chemine dans la pente, le sable entre les doigts, glisse la mer en écho et chante dans l’air. Il va bientôt venir le temps des héritages. La lune cherche un sentier dans les branches, les oiseaux taisent l’air bleu, il est l’heure et la fin de la bataille, il est temps de cracher sur les pierres un poids de déraison. La file se tord de douleur et de froid, à la porte les grands se frottent dans le sifflement. Le vent ravage les fleurs fanées depuis longtemps dans les remords. Ils se tiennent serrés et au chaud sous les branches, les roitelets fugueurs, ils donnent la leçon et font trembler sur les tiges lasses le regret de l’été, le regret du beau temps. Adieu à tous, petits valets de pierre vous comptiez les ruisseaux et les brins d’olivier. Le chien est en partance et règne encore un peu sur son coin de ciel bleu, son paradis d’amour. Sa vie fut un rêve, une parade, un bal de prétendants sur des pointes de soie. Il est toujours à dire l’amour vaincu et vainqueur tour à tour, une fantaisie pleure et chante sous les arbres lassés, promis au couteau du sacrifice. Il est en ce moment du vent sur les cailloux et de la poussière sèche sous le linge. L’horreur est une promesse que tout fera tenir et qui arrivera, elle défait la grandeur. Un spasme, un sanglot pour la belle mourante, dévide son compte de vie à terminer. Les adieux et les pleurs sont à venir ce soir où demain sous les branches étoilées.






Il faut partir et monter vers le royaume où pleurent les agneaux et chantent les innocents tombés des arbres de vengeance, ils ont tout donné et si peu reçu. Au revoir petite, si pâle, qui a régné sur mille façons et sur le bonheur simple et calme de monstres de tendresse. Ils refont le chemin et donnent aux oiseaux du ciel un sacrifice d’heures de bonheur. L’infante ferme un œil et hoquette sur le tapis royal, s’y berce son dernier temps. La tristesse est en marche et ouvre les yeux noirs, ils pleureront bientôt ton départ, gardienne des jours de bonheur simple et de silence. Un grand soupir, les pattes croisées sous le museau, les yeux de l’amour donnent un héritage aux enfants, ils vont vivre sans elle. Il faut que tout se taise et donne de la ferveur, la princesse part pour son grand voyage bien avant les deux fous. Ils la retrouveront, un soir ou un matin, un jour certain, plein de feu et d’orage dans une chaleur d’été, sur une plage, à courir derrière les plumes de la vie, en transe sur le sable, une couronne aux héritiers. L’enfant pose la tête sur ses pattes et coule une larme entre ses cils noircis, la vie fut belle et bonne. La dernière trahison est le temps qui repasse et fait chanter trop haut et pourtant bien. Les effrontés dansent sur le sable et n’oublieront plus cette reine du jour. Adieu, amour véritable bercé sur le champ de l’enfance, la vie s’achève et les temps sont graves et griffés dans le cœur sans blessure, ni sang.





C’était une petite bête qui aimait la vie et surveillait sans cesse son troupeau d’esclaves amoureux. "




Texte de Michel Chalandon : " Esclaves amoureux " ... 19 décembre 2005 ... poésie à Franquevaux

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