mardi 9 août 2011

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" Et assis, à voir, à entendre et à respirer, encore une fois, pour longtemps encore, pour toujours, sûrement, sans écho, sans bruit, dans le nez qui pique, dans la peur qui fait gémir, dans la pâleur qui fait parler et mord encore une fois, je respire et je reviens, je cours, j’y vole, je reviens,

les feuilles, les cailloux, on se dit, on se redit, on tord le chiffon humide, les pleurs, les ouvertures, il est entaillé, il tremble, il secoue et les yeux et les bras, la tête est immense, le bien est caché, les horreurs sont présentes, il faut de la détermination, il faut du courage pour frapper et,

encore la mare, les bêtes s’en vont, les bêtes s’en vont, on se retourne et on compte au ciel la trace des étoiles, au ciel les nuages, les rayons, le temps en fuite, en courbure lente et grave, sous les arbres, le soleil glisse, ils sont partis sous le soleil, ils sont perdus dans la lumière, le pied,

accroche les cailloux un par un, une histoire encore, toujours la même, le cou tordu, le souffle dans le nez, il pique, il est tremblant, il est perdu de lumière et il cherche le silence, à la nuit, les étoiles en fuite le calment. Et à respirer encore, un fois de plus dire non, dire oui, tout faire et n’en rien

aimer, tout entendre et en retenir l’absence, le temps perdu, la vie envolée, les oiseaux blancs au ciel bleu, le calme devant toutes les tempêtes, la peur inattaquable, le repos, le sommeil, il fuit, il fuit, il part, il reviendra, il est une histoire, ô, le silence, la perturbation, les orages,

la fatigue, la fatigue immense, on traîne un pied, un autre, d’une pierre à l’autre, on tourne rond, peut être mal en rond, et sûrement la fatigue, la fatigue, et un peu de cœur levé, un peu de rien tendu dans le nez qui pique, dans la peur qui renaît, on tourne dans la lumière, dans le silence.

Il s’enfuit, il tourne, il reviendra, il y sera, il enfantera encore une histoire, un peuple, un grand dégoût, un hoquet, il est tragique, il est fragile et sourd et il court sous les nuages d’une ombre à l’autre, d’un soupir à un rebond, sursaut, sursaut, santé fragile, toujours la peur et la fatigue,

sans joie, le temps perdu, il faut arracher, il faut convaincre, il faut présenter, il faut dire, se maîtriser, gagner, triompher, la vie sursaute d’une épine à l’autre, petite perdue, l’épine dans le cœur, sous la peau, dans le doigt, la foudre, partout la foudre, perdue dans le ciel noir et bleu,

à l’horizon. En taille, en rebond, en hauteur, par-dessus, la voix en taille haute, monte au ciel, tranquille rossignol hors du temps, hors du propos, hors du rivage, sans raison, tragique, fuyant sous le ciel, sous le ciel, sous le temps passé, perdu, sans histoire, il est délivré de sa souffrance, sa,

il en finit avec le tourment, il est à penser le repos, la mort, le long repos, le deuil si calme, l’affrontement est terminé, Roland souffle ton corps, souffle ta voix, haute taille souffle et brise les rochers, le vallon est loin encore, il viendra, il viendra, tu es épuisé, tu es maîtrisé, le temps a eu sa

place, sa, il a franchi le rocher, il a sauté la barrière, le temps est suspendu sous les arbres, sous les arbres il a vaincu et la peur et le tourment, le torrent glisse, glisse, d’une pierre à une autre, sur sa tête, sur ses mains, son cœur est déroulé, sa main est tendue vers le ciel, vers

le plus noir de cette nuit, vers le plus clair de ce jour, du torrent aux pieds nus, des éclairs aux sentences, l’affront est consommé, la bataille est achevée, au calme, au repos, le temps deviendra clair, il ruinera le front de rides et d’amertume, il tourne, il y revient, la vie est en suspens,

le front est écrasé de fatigue et le cœur enlevé, la toile est pendue dans l’air à sécher, à sécher, il faut enlever un à un les voiles, dévoiler, dévoiler, révéler, revoiler, il tourne, il est perdu Roland, Roland souffle, le roc va se briser, la toile sera fendue, le calme y viendra, le retour suivra,

Roland souffle à corps perdu sous le ciel, sous les nuages, le temps est suspendu, le voile est déchiré. "



Texte de Michel Chalandon : "Roland" ... 9 Août 2010.
poésie à Franquevaux

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